Beaucoup de personnes judiciarisées sont en situation de vulnérabilité, parfois parce qu’elles sont en situation précaire ou d’itinérance, parfois car elles sont aux prises avec des problèmes de santé mentale ou d’addiction, parfois encore car elles sont victimes de maltraitance ou d’abus.
C’est pourquoi de nombreux programmes sociaux ont été mis sur pied comme alternative à leur incarcération, notamment à la Cour municipale de Montréal et à la Cour du Québec.
Programme d’accompagnement justice-santé mentale à Montréal (PAJ-SM)
Ce programme est une alternative à la judiciarisation pour les accusés qui sont aux prises avec des problèmes de santé mentale, qui sont tout de même aptes à subir leur procès, et qui ont commis des infractions mineures qui relèvent de la Cour municipale de Montréal. L’admissibilité au programme sera décidée par le procureur de la poursuite, sur référence d’un intervenant.
Le programme permet de guider les accusés dans leur procédure judiciaire, de les diriger vers des ressources appropriées et d’avoir des juges assignés et bien formés en matière de santé mentale. Il favorise un encadrement, un suivi continu dans la communauté et un traitement adapté à la situation personnelle de l’accusé. Cela permet, en diminuant les risques de récidive, de protéger le public et favoriser la réintégration des accusés qui souffrent de problèmes de santé mentale.
Au terme des audiences de la Cour municipale, l’accusé est soumis à une entente qui pose diverses conditions à déterminer au cas par cas, telles que :
● Ne pas consommer d’alcool ou de drogue
● Éviter d’entrer en contact avec un ou des individus en particulier
● Respecter les recommandations de l’équipe traitante
Par la suite, si l’accusé respecte son entente, les accusations sont susceptibles d’être retirées ou une sentence non privative de liberté peut être imposée. Toutefois, si l’accusé ne respecte pas les conditions de l’entente, son procès est repris devant un tribunal régulier.
Programme d’accompagnement justice itinérance à la cour (PAJIC) et Programme d’accompagnement des personnes en situation d’itinérance (PAPSI)
PAJIC
Le PAJIC cible les personnes qui ont connu une situation d’itinérance passée ou actuelle et qui ont un dossier judiciaire.
Admissibilité
La Clinique Droits Devant est la principale porte d’entrée dans le programme et elle détermine l’admissibilité à celui-ci. Pour être admissible au programme, la personne doit:
● Avoir contre elle une ou plusieurs accusations d’infraction criminelle non jugées à la Cour municipale de Montréal. L’infraction doit être couverte par le programme, ce qui est normalement le cas des infractions en lien avec une situation de précarité.
● Reconnaître ou ne pas contester les faits à l’origine de l’infraction.
● Vivre ou avoir vécu une situation de vulnérabilité sociale, telle que l’instabilité résidentielle, des ennuis de santé mentale ou des problèmes de toxicomanie.
● Avoir déjà entamé une démarche pour améliorer ses conditions de vie, c’est-à-dire démontrer une volonté d’effectuer une démarche d’éducation, de sensibilisation, de prévention, d’intervention, de réparation ou de réhabilitation.
Le suivi des démarches de la personne est régulier auprès des intervenants de la Clinique Droits Devant. Il s’effectue selon les besoins et la situation du participant, et ce généralement pour une période d’un an et demi.
Pendant que le participant suit le programme, le processus judiciaire est reporté à une date ultérieure, il reprendra son cours si le participant abandonne ou échoue le programme. Si le participant réussit le programme, le montant de ses dettes peut être réduit, l’accusation abandonnée ou la peine adaptée.
PAPSI
Depuis 2008, le PAPSI offre également un accompagnement aux personnes en situation d’itinérance. Les intervenants du PAPSI aident les participants à identifier leurs dossiers criminels, puis à prendre des ententes souples et adaptées à leur situation. Ces dernières peuvent convenir de travaux compensatoires (dispensés par des organismes partenaires) ou de paiement, selon le cas.
De la même manière que le PAJIC, le programme vise à régulariser la situation judiciaire des usagers, et à encourager leur réinsertion et leur réadaptation sociale.
Programme d’accompagnement justice toxicomanie (PAJTO)
Depuis 2015, le programme d’accompagnement justice toxicomanie vise à soutenir les personnes qui font face à des accusations criminelles et qui souffrent de toxicomanie, c’est-à-dire de dépendance à la drogue ou à l’alcool. Il permet de sensibiliser les participants aux risques liés à leur toxicomanie, de réduire les risques futurs de problématiques liées à la dépendance, d’offrir une alternative à l’incarcération par l’entremise d’une démarche thérapeutique et d’un suivi post-thérapeutique, ainsi que de favoriser la réadaptation et la réinsertion sociale.
Admissibilité
Pour participer au programme, la personne accusée ainsi que le procureur doivent donner leur accord. De plus, le participant ou la participante doit :
● Admettre avoir une problématique de consommation d’alcool ou de drogues;
● Suivre un processus thérapeutique;
● Accepter les conditions de remise en liberté, s’il y a lieu;
● Accepter la transmission d’informations personnelles concernant sa thérapie, son cheminement et son état général à la cour et à l’équipe intervenante.
Le participant peut retirer son consentement à tout moment, toutefois le processus judiciaire reprend son cours.
Programme Point Final
Depuis 1988, les personnes qui furent, par le passé, jugées coupables de conduite ou de garde et contrôle d’un véhicule alors que leurs capacités de conduire étaient affaiblies par l’alcool ou la drogue peuvent bénéficier du Programme Point Final. Ce dernier vise à réduire le risque de récidive du participant en l’informant et l’éduquant sur les conséquences de la conduite avec les capacités affaiblies par l’alcool ou la drogue.
Admissibilité
Pour être admissible, l’individu ne doit pas avoir contre lui une accusation de conduite dangereuse impliquant des lésions corporelles ou un décès. De plus, lui-même et le procureur doivent donner leurs accords à sa participation.
Pendant la durée du programme, le participant devra également se présenter à une séance hebdomadaire d’éducation et de sensibilisation de 45 minutes et ce, sans manquement. Également, la personne doit assister aux séances prédéterminées des Alcooliques Anonymes (AA), Narcotiques Anonymes (NA) ou Cocaïne Anonymes (CA).
Si elle réussit le programme, l’emprisonnement peut être évité et remplacé par une amende ou de l’emprisonnement avec sursis. Toutefois, à l’échec du programme, le processus judiciaire reprend son cours.
Programme d’accompagnement justice pour les Autochtones (PAJ-A)
Les personnes qui s’identifient comme autochtone (membre des Premières Nations, Inuit ou Métis) et qui font l’objet d’accusations criminelles peuvent bénéficier du Programme d’accompagnement justice pour les autochtones. Le programme est mené par des intervenants du centre d’aide aux victimes d’actes criminels (CAVAC), du Service Côté Cour et du milieu communautaire autochtone, lesquels offrent du soutien tant aux victimes qu’aux personnes accusées.
Ce programme a pour but de diminuer le taux de victimisation et de criminalité chez les Autochtones, en intégrant des valeurs autochtones dans le système de justice et leur permettant une plus grande autonomie dans l’administration de la justice dans leurs collectivités.
La personne est admissible si elle indique qu’elle s’identifie comme Autochtone. Les séances débutent par un mot d’ouverture prononcé par une personne aînée ou un conseiller parajudiciaire autochtone et une cérémonie de purification. Au long du processus judiciaire, des interprètes et des avocats de la défense s’assurent que la personne accusée comprenne bien le processus judiciaire.
Le programme offre une autre voie que l’incarcération, par l’entremise d’un processus individualisé qui cherche la réparation des torts causés, la considération des inégalités systémiques passées et présentes, et le maintien de l’harmonie au sein de la collectivité.
Programme Entraide Vol à l’Étalage (EVE)
Ce programme est offert à la Cour municipale de Montréal aux femmes accusées de délits économiques, tels que le vol ou la fraude. Il est dispensé dans les points de service de Montréal et Gatineau de la Société Elizabeth Fry du Québec (SEFQ), créatrice du programme.
Le service est gratuit, bilingue, peut se faire à distance ou en présentiel et est confidentiel.
Admissibilité
Pour participer au programme, le procureur et l’accusée doivent soumettre leur accord. Les femmes admissibles doivent être accusées du délit économique sur l’île de Montréal ou être assujettie à une mesure de surveillance au Québec. De plus, elles ne seront pas admissibles si elles ne reconnaissent pas leur culpabilité, ont une barrière linguistique, de graves problèmes de santé mentale, souffrent de toxicomanie ou ont une déficience intellectuelle moyenne ou élevée.
But du programme et fonctionnement
Le programme vise à servir de mesure de déjudiciarisation, et de solution de rechange à l’incarcération. Il permet d’encourager les femmes à se responsabiliser, comprendre leurs gestes et conséquences et diminuer la récidive.
Le programme s’effectue en séances de groupe. Dans le cadre d’une première infraction, il est plus court (3 séances), et dans le cas de récidive, plus long (10 séances). Les séances portent sur des thèmes variés, tels que les raisons des délits économiques, les moyens de contrôle face à ces gestes ou encore un volet sur l’estime de soi.
S’il y a réussite du programme, la peine peut être retirée, modifiée ou réduite, selon la décision du juge. Toutefois, si la participante se retire du programme ou l’échoue, le processus judiciaire reprend son cours régulier.
Programme de mesures de rechange général (PMRG) pour adultes
Ce programme permet de recourir à des mesures de rechanges plutôt qu’à des mesures judiciaires traditionnelles. Il permet aux prévenus de se responsabiliser, prendre connaissance des conséquences de leurs actes et de les réparer autrement que par la procédure judiciaire. Il vise donc à prévenir la récidive en évitant que ces personnes ne se retrouvent encore aux prises avec la justice. Ce programme s’inscrit dans une visée de justice réparatrice, permettant au contrevenant de réparer ses torts.
Le programme est disponible à la Cour du Québec dans tous les districts judiciaires, et l’est aussi dans certaines Cours municipales, dont celles de Montréal, Laval et Québec.
Admissibilité
Pour être admissible au programme, il faut:
1) Que l’infraction commise soit admissible au Programme;
Il est à noter que ce seront normalement les infractions moins graves, telles que les vols ou voies de fait sans blessures qui seront admises. Notamment, les violences sexuelles, ou les crimes commis contre des personnes vulnérables ou en contexte conjugal ne sont pas des infractions admissibles.
2) Que la personne accusée reconnaisse les gestes à l’origine de l’infraction qui lui est reprochée;
3) Que la personne accusée manifeste la volonté de collaborer aux mesures de rechange;
C’est le Procureur des poursuites criminelles et pénales qui déterminera l’admissibilité. Pour ce faire, il tiendra compte en plus de plusieurs critères tels que les circonstances de l’infraction, la situation et le point de vue de la victime, les antécédents judiciaires de l’accusé ou encore l’intérêt de la société.
Mesures de rechanges appliquées
Les mesures de rechange varient selon les besoins de la personne accusée, de l’intérêt de la société et de celui de la personne victime. Elles pourraient être des mesures de réparation envers la victime (compensation, médiation, etc.) ou la communauté (services à la collectivité). Elles pourraient également être des mesures de sensibilisation ou de traitement, comme de la thérapie ou des ateliers de gestion de la colère.
Résultat
La personne accusée n’est pas obligée de participer au Programme. Si elle y participe et le complète avec succès, les accusations criminelles contre elle seront rejetées et elle n’aura pas de casier judiciaire.
Programme Conciliation
Le programme Conciliation est un service de résolution de conflit offert aux parties à la suite du dépôt d’une plainte criminelle.
En effet, le programme est particulièrement adapté aux parties qui doivent maintenir certaines relations après la procédure judiciaire, qu’ils soient collègues de travail, amis, voisins, etc. Le programme n’est toutefois pas disponible dans les dossiers de violence conjugales et familiales.
En premier lieu, le procureur rencontre la victime pour déterminer si une entente à l’amiable est possible. Si c’est le cas, il communique avec l’accusé ou son avocat pour trouver un règlement, lequel est soumis à la cour pour approbation. Parfois, la poursuite retire ses accusations et demande plutôt le versement de dédommagements à la victime. Dans les cas où les parties ne s’entendent pas, toutefois, le processus judiciaire reprend son cours normal.
Au long du processus, le Centre d’aide aux victimes d’actes criminels (CAVAC) est une ressource disponible pour la victime tout au long du processus judiciaire. Il peut fournir des explications, de l’écoute, des informations, de l’aide à la préparation du témoignage et même l’accompagnement en Cour.
Programmes pour les victimes
Il existe également certains programmes d’accompagnement pour les victimes d’infractions criminelles.
Programme Côté Cour
Mené par le CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, et offert sur toute l’île de Montréal, le service permet un accompagnement des victimes de violence conjugale ou familiale (et non des accusés) dans le cadre de leurs procédures judiciaires.
Les membres du service évaluent les risques de dangerosité et de récidive au sein de la famille, ainsi que les besoins des enfants témoins ou victimes de violence, pour orienter les usagers vers les ressources appropriées. Ils accompagnent la victime durant le processus judiciaire et tiennent compte de ses demandes et besoins. Notamment, le procureur rencontre la victime pour lui expliquer chaque étape du dossier. De plus, si l’accusé est remis en liberté, la victime sera rapidement informée des conditions de remise en liberté.
Le service joue également un rôle de sensibilisation auprès des acteurs judiciaires et sociaux quant au phénomène de la violence conjugale et familiale, offrant des formations aux procureurs et aux juges impliqués dans ce type de dossier.
Programme d’accompagnement justice contre la maltraitance des aînés (PAJMA)
Depuis 2012, les personnes âgées de plus de 65 ans qui sont victimes de maltraitance ou d’abus peuvent bénéficier du programme d’accompagnement justice contre la maltraitance des aînés. Concrètement, le Centre d’aide aux victimes d’actes criminels (CAVAC) ou le Service Côté Cour accompagne la victime durant le processus judiciaire.
Le programme offre des services d’écoute, d’information et d’accompagnement tout le long du processus judiciaire. Les intervenants traitent la victime dans le respect et la dignité, pouvant l’aider à se préparer pour son témoignage, par exemple. Ils encouragent également les dénonciations et la collection d’éléments de preuve auprès des aînés.
Naviguer dans le système judiciaire peut être complexe, surtout lorsqu’il s’agit d’évaluer l’admissibilité à ces programmes et de défendre ses droits. Chez Lambert Avocats, nous mettons notre expertise à votre service pour vous accompagner à chaque étape du processus.
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