Vous chutez dans le stationnement de votre lieu de travail tout en vous dirigeant vers celui-ci. Vous subissez une fracture au niveau du tibia et n’êtes plus en mesure de travailler pendant quelques semaines. De plus, votre médecin traitant vous annonce que la blessure laissera probablement des séquelles une fois guérie. On vous conseille de faire une réclamation auprès de la CNESST afin de pouvoir obtenir une réparation pour votre préjudice.
Avez-vous accès à de telles prestations, considérant que vous n’étiez ni sur les lieux de travail ni en train de travailler au moment de l’accident? Si oui, quels sont les éléments que vous devrez prouver pour réussir votre réclamation?
Me Lambert répond à ces questions à l’aide d’exemples tirés de la jurisprudence.
Ce que prévoit la loi
Pour obtenir une indemnisation de la part de la CNESST, il faut d’abord démontrer que le préjudice subi est la conséquence d’un accident de travail afin de pouvoir le qualifier de lésion ou de maladie professionnelle.
En temps normal, il existe une présomption légale de lésion professionnelle pesant en faveur du travailleur. En effet, l’article 28 de la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles établit qu’une blessure survenue sur les lieux de travail alors que l’employé est en train de travailler sera présumée être une lésion professionnelle.
Lorsque la blessure survient alors que l’employé est en pause ou qu’il est en train de quitter son lieu de travail, cette présomption ne s’applique plus. Il faudra alors prouver que l’accident est survenu alors que l’employé agissait à l’occasion de son travail. De plus, il sera également nécessaire de démontrer le caractère soudain et imprévisible de l’incident ainsi que la relation entre ce dernier et la lésion occasionnée.
Pour déterminer si un accident s’est produit à l’occasion du travail, le tribunal considérera plusieurs facteurs, entre autres:
- le lieu de l’événement;
- le moment de l’événement;
- la rémunération de l’activité exercée par le travailleur au moment de l’événement;
- l’existence et le degré d’autorité ou de subordination à l’employeur lorsque l’événement ne survient ni sur les lieux ni durant les heures de travail;
- la finalité de l’activité exercée au moment de l’événement, qu’elle soit incidente, accessoire ou facultative à ses conditions de travail;
- le caractère de connexité ou d’utilité relative de l’activité de la travailleuse au regard de l’accomplissement du travail.
Bien que ces critères servent de lignes directrices, il n’est pas nécessaire qu’ils soient tous présents pour réussir votre réclamation. L’importance donnée à chaque élément variera selon les circonstances et les faits propres à chaque situation.
Accident en arrivant ou en quittant le lieu de travail
De façon générale, les réclamations concernant des blessures subies alors que l’employé se dirige vers son lieu de travail ou quitte celui-ci sont accueillies. Tel est le cas d’une serveuse, travaillant pour les Rôtisseries St-Hubert, qui, en terminant son quart de travail, glisse et tombe dans le stationnement du restaurant. En ce faisant, elle se fracture la cheville. La réclamation est accueillie, car l’accident est survenu de façon concomitante avec le départ du lieu de travail, c’est-à-dire, que peu de temps s’était écoulé depuis la fin du quart de travail.
Il est également reconnu dans la jurisprudence qu’une blessure qui survient sur les voies d’accès au travail mises à la disposition des travailleurs par l’employeur pour quitter ou arriver sur le lieu représente une lésion professionnelle, puisqu’il existe un lien suffisamment fort avec le travail. Ainsi, la jurisprudence reconnait les accidents survenus dans un stationnement, ou une cage d’escalier permettant l’accès au lieu de travail et fournis par l’employeur, comme ayant eu lieu à l’occasion du travail.
Il est important de mentionner que, les voies publiques permettant de se rendre au lieu de travail ne sont toutefois pas reconnues par la jurisprudence. C’est le cas des rues ou des parcs que le travailleur doit traverser pour se rendre au travail, à la maison ou encore, à sa voiture garée.
Accident de travail pendant une pause
Les blessures accidentelles étant survenues durant les pauses sont généralement reconnues comme des lésions professionnelles par la jurisprudence. Les critères sont principalement les mêmes que pour les accidents survenus en dehors du lieu de travail. Ainsi, la jurisprudence a reconnu un accident lors d’une partie de ski, une coupure à la main lors d’une pause-repas et une chute lors d’une pause pour se dégourdir les jambes comme étant des accidents de travail.
À noter que seulement les accidents survenus lors d’activités incidentes au travail seront indemnisés et non les activités de nature personnelle. Par exemple, un travailleur s’étant blessé alors qu’il prenait une pause pour fumer a vu sa requête rejetée. En effet, selon le juge, il s’agissait ici d’un choix personnel qui n’avait rien à avoir avec l’accomplissement du travail.
Les accidents survenus lors d’activités interdites par l’employeur seront aussi rarement indemnisés.
Si vous avez d’autres questions concernant cet article ou avez été victime d’un accident de travail, n’hésitez pas à contacter notre cabinet.