Si vous voulez faire un achat sur le web, la dernière étape est bien souvent de passer au travers des kilomètres de textes juridiques afin de cliquer sur la petite case « J’ai lu et j’accepte les termes et conditions ». Il est compréhensible que peu de personnes lisent en entièreté ces contrats, parfois à cause d’un manque de temps, parfois à cause d’un sentiment d’impuissance face à stipulations qu’on ne peut pas négocier.
Il peut parfois sembler que certaines compagnies utilisent cette situation de pouvoir pour inclure des clauses si grotesques que cela leur permettrait de vous voler en toute impunité. Heureusement, un certain concept juridique peut vous aider dans ce type de situation : la clause abusive.
Afin d’invoquer avec succès cette notion, il faut 2 éléments primordiaux qui découlent de l’article 1437 du Code civil du Québec : un contrat d’adhésion ou de consommation et une clause jugée abusive.
Définition de contrat d’adhésion ou de consommation
Afin d’être qualifié d’adhésion, un contrat doit répondre à la définition de l’article 1379 du Code civil du Québec. Cela signifie qu’il faut qu’il y ait eu une partie forte qui a décidé la majorité du contenu du document et que l’autre partie n’ait pas pu négocier les stipulations essentielles. Ainsi, les modalités d’un achat d’ordinateur en ligne et l’achat d’un billet de loterie au dépanneur sont par exemple des contrats d’adhésion.
Il est important de noter que la grande majorité des documents qu’un individu signera dans sa vie avec des compagnies seront des contrats d’adhésion, car il n’est pas possible de modifier les conditions de service. Toutefois, dès qu’il existe la possibilité pour les deux parties de modifier les stipulations essentielles, cela empêche l’application de l’article 1437. Par exemple, un contrat d’emploi où l’employé a pu négocier son salaire et certaines autres clauses n’est pas considéré comme un contrat d’adhésion. Ainsi, il faut évaluer si le signataire avait son mot à dire sur les clauses dites importantes.
L’article 1437 s’applique aussi aux contrats de consommation. Il faut noter que tous les contrats de consommation sont des contrats d’adhésion, mais que tous les contrats d’adhésion ne sont pas des contrats de consommation. Toutefois, il est intéressant de se pencher sur cette notion distincte. La définition de ce type d’acte se situe à l’article 1384 du Code civil du Québec et dans la Loi sur la protection du consommateur.
Bien qu’il existe de légères différences entre le droit commun du Code civil du Québec et la Loi sur la protection du consommateur, l’essence de ces définitions est la même: le contrat doit lier un consommateur et un commerçant dans le cours des activités de son commerce. Dans cette définition, un consommateur est une personne physique qui n’est pas un commerçant et qui se procure un bien ou un service. Ainsi, toute personne qui se procure un bien ou un service pour son propre compte auprès d’une entreprise a de très bonnes chances de se situer à l’intérieur de la définition de la Loi sur la protection du consommateur.
La difficulté avec la clause abusive réside bien souvent dans l’évaluation du caractère abusif de la clause, et non dans le type de contrat présent. Nous allons donc approfondir cette facette dans les prochains paragraphes.
Définition de clause abusive
Afin de reconnaitre le caractère abusif d’une clause, il faut se baser sur le texte de l’article 1437 du Code civil. Ce texte définit la clause abusive comme suit :
Est abusive toute clause qui désavantage le consommateur ou l’adhérent d’une manière excessive et déraisonnable, allant ainsi à l’encontre de ce qu’exige la bonne foi; est abusive, notamment, la clause si éloignée des obligations essentielles qui découlent des règles gouvernant habituellement le contrat qu’elle dénature celui-ci.
Ainsi, le législateur souhaite rendre inopérante toute clause si draconienne et injuste qu’elle va contre la notion même d’équité. Il existe une infinité de possibilités de situation ou un contrat semble nuire disproportionnément au parti le plus faible, mais les deux catégories les plus touchées par ces clauses sont les clauses exonératoires et les clauses pénales.
Les clauses exonératoires
Les clauses exonératoires sont des clauses qui permettent à une partie de retirer sa responsabilité dans certains types de situations. Toutefois, cela est parfois jugé exagéré et abusif par la cour. Ce fut le cas par exemple lorsque Hydro-Québec tenta d’utiliser une clause d’exonération pour ne pas être responsable d’un feu causé par ses fils électriques ou lorsqu’une agence de voyages tenta d’utiliser une clause similaire afin de ne pas rembourser des clients qui avaient acheté des billets d’avion pour une plage qui fut dévastée par un ouragan.
Les clauses pénales
Les clauses pénales quant à elles désignent les clauses qui donnent des conséquences trop abruptes lorsqu’une partie ne respecte pas parfaitement le contrat. Ceci peut être le cas pour des taux d’intérêt exorbitants pour des retards de paiement, ou pour des pénalités économiques agressives lorsqu’une clause n’est pas respectée.
Maintenant qu’il est possible d’identifier une clause abusive dans un contrat d’adhésion ou de consommation, la question qui reste est quelles seront les conséquences concrètes si un juge reconnaît votre situation.
Impact de la clause abusive
Si les critères de la clause abusive sont remplis, 3 options s’offrent alors à un juge. Il peut modifier la clause abusive afin de la rendre adéquate, mais ce pouvoir est plus rarement utilisé. En effet, règle générale le juge frappe plutôt de nullité la clause dite abusive ou sinon il se peut que le juge annule complètement le contrat si la clause abusive était si prédominante qu’elle rendait l’ensemble de l’acte inadéquat.
En conclusion, la clause abusive peut se révéler très utile lorsqu’une personne physique ou une personne morale de petite taille sans pouvoir de négociation signe un contrat avec un tiers contenant des clauses excessives.
Si vous ou l’un de vos proches pensez qu’une compagnie ou une personne physique a abusé de sa situation de force afin d’inclure des clauses abusives, n’hésitez pas à nous contacter afin de savoir vos droits. Dans certains cas, une action collective peut être possible.