Trouvez-vous que votre service de connexion internet, de télévision et de téléphonie vous coute bien cher? Cela ne serait pas surprenant considérant que le Rapport de surveillance des communications 2019 nous apprend que:
les ménages canadiens ont dépensé en moyenne 233,00 $ par mois pour leurs services de communication, une augmentation de 10,17 $ (4,6 %) par rapport à 2016.
De plus, lorsqu’on est client de ces grandes compagnies, il est facile de se sentir pris au piège, car d’importants frais d’annulation de contrat sont souvent prévus si l’on désire changer de fournisseur.
Toutefois, ces frais sont-ils légaux? Cette capsule présentera le droit applicable en termes de résiliation de contrat de télécommunication.
Les anciennes sources législatives
Traditionnellement, c’était l’article 2125 du C.c.Q. qui mettait en place le principe de base qu’un client peut résilier un contrat bien que son exécution ait commencée, mais l’article 2129 du Code prévoit aussi les pénalités qui peuvent être exigés pour une telle résiliation. En effet, cet article fait en sorte qu’un client qui a résilié unilatéralement son contrat doit compenser pour la valeur des travaux exécutés avant la résiliation, la valeur des biens fournis ainsi que tout autre préjudice que l’autre partie a pu subir.
Cependant, ces articles ne sont que le régime de base et ils ne sont pas d’ordre public. Cela veut dire que les parties peuvent contractuellement repousser ces règles mises en place par le législateur, tel que vu au paragraphe 50 de cette décision. En d’autres mots, si le contrat est silencieux, les articles 2125 et 2129 du Code s’appliquent, mais sinon, le régime contractuel prévaut.
Cela laissait donc les consommateurs à la merci des grandes compagnies qui pouvaient prévoir ce qu’elles voulaient dans leur contrat. Heureusement, malgré les indications du contrat, il existe des recours afin de contrer les indemnités exigées.
Clause abusive sous la LPC
En effet, concept de frais de résiliation abusifs peuvent se baser à la fois sur le Code civil du Québec ou sur la Loi sur la protection du consommateur (L.p.c.). Les lecteurs réguliers de nos capsules juridiques auront sûrement déjà entendu parler du concept de clause abusive en matière contractuelle. Si vous n’êtes pas familiers avec ce concept, nous vous invitons à consulter cet article afin d’approfondir vos connaissances.
Le concept de clause abusive s’applique lorsqu’une partie semble profiter de sa position de force afin d’appliquer des pénalités disproportionnées. Si tel est le cas, les tribunaux peuvent alors annuler si elles répondent au critères de l’article 1437 C.c.Q.. Voilà pourquoi un juge mis de côté les règles contractuellement prévues pour les frais de résiliations dans un dossier contre Bell, car:
« Bell profite, pour ne pas dire abuse, en quelque sorte, d’une position dominante et qu’elle s’écarte des pratiques contractuelles généralement acceptées. »
Les nouvelles dispositions de la LPC
Malgré la protection mise en place par le principe de clause abusive, ce régime se révéla fort peu utile afin de protéger le public des grandes multinationales ayant un monopole sur des services essentiels. En effet, les critères étaient difficilement applicable et ce sujet était la source du plus grand nombre de plaintes à l’Office de protection du consommateur. Voilà pourquoi le législateur mit en place en 2009 les articles 214.1 à 214.11.
Ces articles s’appliquent à tout contrat à exécution successive de service fourni à distance, ce qui est le cas des contrats de télécommunication. Toutefois, ces articles distinguent entre le contrat à durée déterminée et le contrat à durée indéterminée.
Dans un contrat à durée déterminée, si le consommateur n’a pas reçu un bénéfice économique, le cout de résiliation ne peut dépasser la moindre des sommes entre 50$ ou une somme représentant 10% du prix des services prévus au contrat. Toutefois, si un bénéfice économique a été octroyé, par exemple, si le consommateur a reçu un bien à un prix réduit, tel qu’un téléphone, l’article 79.10 du Règlement d’application de la Loi sur la protection du consommateur prévoit que l’indemnité maximale est le nombre de mois restant au contrat/durée du contrat, multiplié par le rabais sur le prix du bien.
Pour un contrat à durée indéterminée, si le consommateur n’a pas reçu un bénéfice économique, le cout de résiliation doit automatiquement être de 0$ en vertu de l’article 214.8 de la Loi.
Ceci serait par exemple le cas de Netflix, qui ne pourrait exiger des frais de résiliation si vous désirez vous retirer de votre contrat. S’il y a un bénéfice économique, l’article 79.11 du Règlement d’application de la Loi prévoit que le cout de d’annulation du contrat doit être au maximum le solde sur le prix du bien, moins 1/48 du solde sur le prix de vente du bien, multiplié par le nombre de mois écoulé au contrat. Cela signifie donc qu’après 4 ans, il ne peut pas y avoir d’indemnité. Un effet intéressant de ce calcul est que si vous avez maintenu votre contrat de durée indéterminée pendant plus de 4 ans, il est alors illégal pour le fournisseur de service de vous charger une indemnité de départ, même s’il vous a fourni un bénéfice économique.
En conclusion, les nouveaux articles 214.1 à 214.11 ont grandement le droit applicable dans les contrats de télécommunication. Avant cette date, il fallait prouver l’exploitation du consommateur, mais de nos jours il ne faut que vérifier si fournisseurs de services respectent leurs obligations prévues par la législation.
Si vous croyez que vos droits ne sont pas respectés, il y a de fortes chances que vous ne soyez pas seul dans votre situation. Dans certains cas, une action collective peut être possible. N’hésitez pas à nous contacter afin de connaitre vos options.