Il arrive que des locataires se retrouvent forcés à emménager ou à habiter dans un logement insalubre, voir même impropre à l’habitation.
Bien qu’un locataire confronté à une telle réalité dispose de certains recours pour faire voir ses droits, dont notamment l’abandon de logement, il est important de distinguer un logement impropre à l’habitation du logement en mauvais état d’habitabilité. N’hésitez pas à planifier une consultation avec un avocat en droit des locataires avant toute action.
Étant donné qu’il peut être parfois difficile de faire cette distinction, nous vous présentons un survol de la jurisprudence et des indices permettant de déterminer si votre logement est impropre à l’habitation.
Qu’est qu’un logement impropre à l’habitation?
Selon le Code civil du Québec, un logement est impropre à l’habitation lorsque son état constitue une menace sérieuse pour la santé ou la sécurité des occupants ou du public ou lorsqu’il a été déclaré tel par le tribunal ou par l’autorité compétente. Le mot « santé » employé ici vise aussi bien la santé physique que psychologique du locataire.
Afin d’évaluer si l’état du logement constitue une menace sérieuse pour la santé ou la sécurité de ses occupants, il est important de prendre en considération tous les faits et d’évaluer la situation de façon objective. Ce critère implique également que le danger doit être imminent, et ne serait rencontré donc que dans les cas les plus sérieux, tels que l’inondation, l’absence de chauffage en hiver ou encore une infestation grave et prolongée de vermine.
Le Code civil du Québec permet au tribunal de déclarer d’office qu’un logement est impropre à l’habitation, donc sans même que le locataire n’ait à le demander. Les autorités municipales ont également la compétence pour faire déclarer un logement impropre à l’habitation; le locataire est donc libre de faire appel au service d’inspection de la ville dans laquelle il se situe afin de tenter d’obtenir un rapport.
Exemples jurisprudentiels
Le Tribunal administratif du logement a eu l’occasion à maintes reprises de statuer sur l’impropreté d’un logement.
L’infestation grave et prolongée de vermines
La jurisprudence établit que seule l’infestation grave et prolongée de vermines permet de faire déclarer qu’un logement est impropre à l’habitation. Cette infestation doit aussi comporter une menace sérieuse pour la santé ou la sécurité du locataire.
Ainsi, la présence d’abeilles ou de fourmis ne permet pas de faire déclarer qu’un logement est impropre à l’habitation. Dans Tarsone c. Villeneuve, le Tribunal a statué que même la présence d’oiseaux morts dans les murs ne suffit pas à conclure que le logement est impropre. Dans l’affaire Shiri c. Maislin, la juge administrative établit que la simple présence de coquerelles ne rend pas un logement impropre à l’habitation, tant que cette infestation n’est pas suffisamment grave pour constituer une menace sérieuse pour la santé et la sécurité du locataire. Toutefois, dans l’affaire Dufresne c. Lachance, le Tribunal conclut que la présence de rats pendant plusieurs semaines dans le logement constitue un risque sérieux pour la santé et la sécurité des locataires.
Dans le cas d’infestation de vermines, il est donc important de garder à l’esprit que leur simple présence ne suffit pas à faire déclarer un logement impropre à l’habitation. Il est impératif de prouver que cette infestation est grave et prolongée, et qu’elle constitue une menace grave et sérieuse pour la santé du locataire.
L’électricité et le chauffage
Un système électrique défectueux qui constitue un risque sérieux d’incendie peut rendre le logement impropre à l’habitation, selon l’affaire Perron c. Paillé. L’interruption en électricité pour le chauffage, l’eau chaude et la cuisinière rendent aussi le logement impropre à l’habitation.
Le logement sera aussi considéré impropre à l’habitation s’il n’est pas du tout chauffé, et que cette absence de chauffage met la santé et la sécurité du locataire en danger. Il faut par contre faire bien attention, parce qu’une défectuosité ponctuelle, qui survient une seule fois et qui est rapidement réparée, ne permet pas de faire déclarer le logement impropre à l’habitation.
Les odeurs
Des fortes odeurs qui persistent dans le temps peuvent aussi suffire à faire déclarer un logement impropre à l’habitation. En effet, dans l’affaire Nguyen c. Rivard, les locataires constatent des odeurs d’égout et d’urine animale dans leur appartement. Ces odeurs sont tellement fortes que la santé de leur fille s’est détériorée depuis leur arrivée. Le tribunal constate donc que le logement est impropre à l’habitation.
Cependant, le locataire d’un logement situé au rez-de-chaussée ne pourra pas faire déclarer son appartement impropre à l’habitation en raison des odeurs émanant des véhicules circulant sur la rue. En effet, la jurisprudence explique que le locataire placé dans une telle situation aurait dû mieux choisir son logement.
L’encombrement du logement
Un encombrement excessif qui met à risque la santé et la sécurité du locataire, empêchant le locataire d’entrer ou de sortir du logement, ou encore qui constitue un risque d’incendie peut aussi faire déclarer un logement impropre à l’habitation.
L’humidité et la moisissure
Un logement dont le taux d’humidité est excessif ou dont la présence de moisissure est importante et grave peut être déclaré impropre à l’habitation. Toutefois, il est primordial de démontrer que l’humidité ou la moisissure constituent un danger grave pour la santé et la sécurité des occupants du logement concerné.
L’eau et l’inondation
Un logement non alimenté en eau, dont l’eau n’est pas potable ou qui n’a pas d’eau courante est un logement impropre à l’habitation. De la même façon, des infiltrations d’eau importantes permettent aussi au Tribunal de déclarer que le logement est impropre à l’habitation.
Bien évidemment, l’inondation d’un logement le rend aussi impropre à l’habitation. En effet, la cour a statué, dans l’affaire Alvarez Zambrano c. Sergakis inc., que le fait de « demeurer dans ces lieux inondés, où l’eau continuait de s’infiltrer durant plusieurs jours, pouvait certainement constituer une menace pour la santé ».
Le comportement du locateur ou des autres locataires
Étant donné qu’un logement est impropre à l’habitation lorsque son état constitue une menace sérieuse pour la santé ou la sécurité des occupants ou du public, le comportement du locateur ou des autres locataires ne permet pas de le faire déclarer impropre. Ainsi, même si le locataire concerné est menacé ou subit du harcèlement sexuel, il ne pourra prétendre que son logement est impropre à l’habitation.
Toutefois, d’autres recours s’offrent au locataire lésé, telle la résiliation du bail.
Abandon du logement
Outre un recours en réduction de loyer, en résiliation de bail et en dommages-intérêts, le locataire qui habite dans un logement impropre à l’habitation peut l’abandonner en cours de bail. Cependant, le locataire doit faire très attention avant de choisir d’abandonner son logement. En effet, si l’abandon semble être injustifié ou prématuré, le locataire pourrait se voir condamner à verser au locateur des dommages-intérêts pour la perte de revenus de location. Il est donc judicieux que le locataire recueille et conserve le plus d’éléments de preuve possible, étant donné que le fardeau de preuve lui revient.
Voici quelques cas les plus fréquents rencontrés par nos clients :
Si vous vous trouvez dans une situation de logement impropre à l’habitation, n’hésitez pas à contacter notre équipe spécialisée en droit du logement pour défendre vos droits contre votre propriétaire.