La fraude est une infraction criminelle prévue au Code criminel qu’on peut qualifier de crime économique. Elle consiste à encourir la perte du public ou toute autre personne d’un bien, service, argent ou valeur par supercherie, une tromperie qui implique la substitution d’un faux à l’authentique, mensonge ou tout autre moyen dolosif.
Pour prouver l’infraction de fraude, la poursuite devra démontrer hors de tout doute raisonnable les éléments constitutifs : soit l’actus reus (élément matériel) et la mens rea (élément moral).
Dans l’arrêt Théroux, la Cour Suprême du Canada énonce les éléments constitutifs de l’infraction de fraude que la poursuite devra prouver.
Actus reus
Tout d’abord, il y a la présence d’un acte malhonnête. Cet acte doit constituer un comportement dolosif tel que de la supercherie ou le mensonge. Il est possible aussi que certains actes dolosifs soient considérés comme « malhonnêtes » même s’ils n’impliquent pas de supercherie ou de mensonge, tels que le seraient la dissimulation de faits importants, l’exploitation de la faiblesse d’autrui, le détournement non autorisé de fonds ou l’usurpation illégale.
C’est dans l’arrêt Zlatic que la Cour suprême a défini la malhonnêteté comme « l’emploi illégitime d’une chose sur laquelle une personne a un droit, de telle sorte que ce droit d’autrui se trouve éteint ou compromis ». Il ne suffit pas d’être négligent, il faut avoir profité d’une chance au détriment d’autrui, et que notre conduite soit dénuée de scrupules.
Deuxièmement, il y a la présence de privation causée par cet acte malhonnête. La privation est un préjudice économique ou un risque de préjudice économique subi par la victime. Il n’est donc pas nécessaire que la victime subisse une perte réelle, seul le risque de perte suffit. De plus, celui qui comment la fraude sera reconnu coupable indépendamment du fait qu’il ait tiré profit ou non de cette privation.
Mens rea
La poursuite devra prouver que l’accusé:
- Savait qu’il commettait un acte malhonnête et prohibé.
- Savait que cet acte malhonnête entraînerait un préjudice ou risque de préjudice pour la victime. Il n’est pas nécessaire que l’accusé ait eu une intention malveillante, ou de nuire à la victime, mais plutôt qu’il ait pu envisager les conséquences de son acte.
À titre d’exemple, dans l’affaire Robitaille, l’accusé a été reconnu coupable de fraude pour avoir cédé ses droits d’acheter une propriété sans informer la victime que le vendeur était inapte, et donc incapable de vendre sa maison. Bien que l’accusé ait ajouté une clause dans le contrat énonçant le refus de cession du vendeur et que la victime ait fait preuve de négligence en ne la lisant pas, la Cour du Québec conclut que son silence était malhonnête, et que l’accusé était pleinement conscient du fait qu’il entraînerait une privation pour la victime. Ses efforts pour dissimuler l’inaptitude témoignaient d’un « moyen dolosif », d’un acte frauduleux.
Peines
La peine dépendra de la valeur pécuniaire du préjudice causé à la victime.
- Si la valeur du bien, service, argent ou valeur faisant objet de fraude est moins de 5 000$, la peine d’emprisonnement maximale sera de 2 ans.
- Si au contraire la valeur dépasse 5 000$, ou encore l’objet de la fraude est un testament, l’emprisonnement maximal sera de 14 ans. Pour les fraudes dont la valeur dépasse 5 000$, les peines d’emprisonnement avec sursis ou d’absolution ne sont pas disponibles.
Le tribunal tiendra compte de plusieurs facteurs dans la détermination de la peine, tels que :
- La complexité, l’ampleur ou le niveau de planification de la fraude commise;
- L’impact de l’infraction sur la stabilité économique canadienne;
- Le nombre de victimes et les conséquences de la fraude sur ces dernières;
- Le fait que l’accusé ait profité de sa réputation d’intégrité dans la communauté;
- La dissimulation ou destruction de dossiers relatifs à la fraude.