Le droit disciplinaire est un droit sui generis, soit une branche de droit qui obéit à ses propres règles. Ainsi, alors qu’en en droit criminel, l’accusé n’est jamais contraint de répondre aux questions des policiers, ou de témoigner, l’article 147 du Code des professions prévoit qu’en droit disciplinaire, le professionnel est contraignable.
Cela signifie qu’il peut être forcé de témoigner et qu’il est obligé de répondre aux questions du syndic lors de son enquête, il ne pourra pas invoquer son droit au silence ni son obligation de respecter le secret professionnel.
Ainsi, lorsque le syndic interroge le professionnel, ce dernier, contraint de répondre, pourrait devoir admettre des éléments en sa défaveur. Bien que le droit disciplinaire soit une branche du droit à part entière, les règles de preuve et d’administration de la preuve en droit disciplinaire sont celles prévues par le Code civil du Québec.
Les déclarations du professionnel pourraient constituer ce qu’on appelle un aveu extrajudiciaire, soit fait hors de l’instance judiciaire. L’aveu est défini par l’article 2850 du Code civil du Québec : il implique la reconnaissance d’un fait de nature à produire des conséquences juridiques défavorables contre son auteur. En d’autres mots, il s’agit d’une déclaration du professionnel l’incriminant ou reconnaissant son tort, qui pourra éventuellement être retenue contre lui.
Conditions de validité de l’aveu
Ce n’est pas n’importe quelle déclaration qui sera qualifiée d’aveu. Elle doit remplir certaines conditions, et il appartiendra au tribunal de la qualifier d’aveu ou non.
Entre autres:
- L’aveu peut être écrit ou verbal.
- L’aveu peut être implicite ou explicite.
- L’aveu doit être clair, sans ambiguïté et sans équivoque. Il ne peut découler du simple silence que dans des cas prévus par la loi.
- L’aveu doit porter sur une question de fait et non sur une question de droit.
- Une excuse, soit une manifestation de sympathie ou de regret, ne constitue pas un aveu et ne peut être admise en preuve contre le professionnel.
Un enregistrement des propos du professionnel par son patient ou le syndic, ou encore des lettres ou courriels écrits par le professionnel, pourraient également constituer des aveux extrajudiciaires. Pour que l’aveu fasse effet contre le professionnel, il appartiendra au syndic de l’alléguer et de le prouver devant le Conseil de discipline.
Ainsi, le syndic devra prouver l’aveu par son propre témoignage sous serment, ou en le mettant en preuve s’il s’agit d’un document écrit ou d’un enregistrement. Il appartiendra par la suite au Conseil de discipline de juger la force probante de l’aveu, soit sa valeur juridique, qui se traduit par la fiabilité et l’importance qu’il lui accordera.
Une fois que l’aveu extrajudiciaire est mis en preuve par le syndic, il bénéficie d’une présomption de vérité. En effet, on estime qu’il est contre nature pour une personne de mentir sur un élément qui lui est préjudiciable, c’est pourquoi l’aveu est généralement considéré comme bénéficiant d’une grande fiabilité. Cependant, le professionnel pourra tenter de démontrer la fausseté du contenu de l’aveu ou de le révoquer en expliquant pourquoi ses propos étaient faux.
Allégation d’un aveu extrajudiciaire contre un professionnel
Les tribunaux ont reconnu qu’il n’existe pas d’obligation pour le syndic d’envoyer un avis officiel au professionnel de son intention d’alléguer un aveu extrajudiciaire contre lui.
Cependant, dans un dossier impliquant un psychologue, le Tribunal des professions a conclu que, dans un souci de transparence et de divulgation complète de la preuve, il est souhaitable que le professionnel soit informé de l’allégation d’un aveu extrajudiciaire que le syndic entend déposer. Ainsi, si le syndic n’informe pas le professionnel de son intention d’alléguer un aveu extrajudiciaire et le prend par surprise, il est possible que les tribunaux y voient un manquement à l’équité procédurale et au droit du professionnel à une défense pleine et entière.
Finalement, les tribunaux feront preuve de souplesse quant à la manière dont le syndic peut informer le professionnel, n’exigeant pas qu’il identifie les passages précis du document ou de l’enregistrement qu’il entend utiliser à titre d’aveu extrajudiciaire.
Si vous êtes convoqué par le syndic ou si vous craignez que vos déclarations puissent être retenues contre vous, il est primordial d’obtenir des conseils juridiques dès le début du processus disciplinaire.
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